Chaque génération a eu ses hommes et femmes de bonne volonté
- Par guy sembic
- Le 14/01/2021 à 09:48
- Dans Chroniques et Marmelades diverses
- 0 commentaire
… “Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas. Mais ma tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde se défasse.” [ Discours de Suède, remise du Prix Nobel de Littérature le 10 décembre 1957 à Oslo, Albert Camus ]
… La génération d’Albert Camus fut en gros celle des gens nés entre 1910 et 1920 ayant traversé le 20 ème siècle jusqu’en ses dernières années…
Certes, de grands esprits, de grands auteurs, de grands artistes, gens de cinéma et de théâtre, et de littérature, aujourd’hui en 2021 quasiment tous disparus… Furent en leur temps, de cette génération qui n’a pas pour autant, même avec ses “géants”, ses “immortels” de l’Art, de la Littérature, du Théâtre et du Cinéma ; refait le monde…
D’ailleurs, quelle génération à vrai dire, de quel siècle, de quelle Histoire, de quel passé, l’a refait, le monde ?
La génération d’Albert Camus étant celle de tous les hommes, de toutes les femmes de partout dans le monde, de 1920 jusqu’au début des années 2000; est cependant celle qui, depuis la Renaissance au 16 ème siècle, a commencé à défaire le monde, ce qui explique à quel point la tâche d’Albert Camus consistant à empêcher que le monde se défasse, a été difficile…
La génération qui suit celle d’Albert Camus, en gros celle des gens nés après 1950, et à plus forte raison celle des nés après 1980/1990… Est celle qui a continué à défaire le monde encore davantage, en dépit de tous ces hommes et femmes de bonne volonté, artistes, intellectuels, bâtisseurs, créateurs, qui n’avaient jamais été aussi nombreux…
Aussi la tâche de chacun de ces hommes et femmes de bonne volonté, artistes, intellectuels, penseurs, créateurs, bâtisseurs, fondateurs, meneurs – ou gens du commun tout autant chacun à leur manière et selon leurs capacités… La tâche de chacun d’entre nous en ce siècle, le 21ème, qui consiste à éviter que le monde se défasse ; est-elle encore plus difficile, plus incertaine, que du temps d’Albert Camus…
Non pas que cette tâche soit impossible – est-il vraiment “trop tard”? - mais ce sont les “dés pipés” jetés sur le tapis qui roulent et dont on sait quelle face ils vont présenter en s’immobilisant… Ou les “mauvaises cartes” qui vont s’abattre sur le tapis, celles avec lesquelles on ne peut gagner la partie…
Et avec ces jeux là, de dés ou de cartes, qu’il faut continuer la partie…
Les générations d’avant celles du 20 ème siècle, aussi loin que l’on remonte dans le temps, ont toutes “salopé” le monde, fait des sociétés violentes, des guerres de domination et de conquêtes… Mais aucune de ces générations n’avait encore défait le monde comme a commencé à le faire la génération des nés entre 1920 et 2000, et comme a continué à le faire davantage, la génération des nés après 1950…
Ce qui défait le monde dépasse le cadre des sociétés violentes et inégalitaires, dépasse le cadre des guerres de domination, dépasse même le cadre des progrès technologiques dans la rapidité de leur évolution…
Ce qui défait le monde tient à l’absence de repères, d’horizon, dans un paysage que l’on ne reconnaît plus tant il a été dénaturé et transformé ; à l’oubli conscient ou inconscient de nos origines naturelles, au désintéressement tout aussi conscient ou inconscient de notre avenir…
Des sociétés violentes et inégalitaires, des guerres, des grandes crises économiques et sociales, des obscurantismes, de toutes les périodes sombres de l’histoire de l’humanité, l’on peut toujours s’en remettre, c’est d’ailleurs ce qui s’est passé durant des milliers d’années dans un mouvement de va et vient, de retours, de recommencements, d’avancées et de reculs, de hauts et de bas se succédant comme des marches ou des paliers…
Mais, de la disparition des repères et des racines, du désintéressement de l’avenir dans la consommation la plus effrénée du présent, l’on ne s’en remet pas…
Ajouter un commentaire