Articles de yugcib
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Le journal de Kafka, par Marthe Robert
- Par guy sembic
- Le 27/10/2012
- Dans Livres et littérature
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Marthe Robert née le 25 mars 1914 et décédée le 12 avril 1996, est une critique littéraire Française, et l'un des plus éminents spécialistes de l'oeuvre de Frantz Kafka.
Dans sa jeunesse elle décida d'apprendre l'Allemand parce que son père ayant combattu durant la première guerre mondiale, était devenu un militant pour la paix.
Après ses études à la Sorbonne, Marthe Robert intègre l'université Johann Goethe à Frankfurt.
Elle fut une traductrice fidèle de l'oeuvre de Kafka.
LE JOURNAL DE KAFKA, traduit et présenté par Marthe Robert. (Le livre de Poche, biblio, 674 pages)
Ce combat entre Kafka et le monde, avait quelque chose de paradoxal…
Poète, Kafka se sentait différent du commun des mortels et par conséquent contraint d’affirmer sa singularité. Ce qui rendait inévitable sa lutte avec le monde.
Cependant, Kafka avait en même temps une autre préoccupation, un autre regard que celui d’un écrivain sans complaisance à l’égard du monde : il a voulu aider le monde à se défendre, en particulier par ce besoin qu’il sentait, de surmonter sa révolte (et plus généralement celle de l’individu), et de trouver la route ouvrant le passage vers une communauté vivante, celle des hommes coexistant ensemble dans une tradition, une culture, une histoire…
Ce journal est, selon Marthe Robert, « le témoignage le plus poignant de toute l’histoire de la littérature ».
« Nous avons été chassés du paradis mais le paradis n’a pas été détruit pour cela »…
Ce « paradis » n’était-il pas cette Connaissance, ou mieux peut-être, cette « vérité » originelle, totalement pure, en l'absence de tous ces mécanismes inextricables des codes et des procédures, de toutes ces lois et de tous ces systèmes politiques et économiques constituant un immense carcan ?
Retrouver ce " paradis qui n'a pas été détruit mais dont nous nous sommes nous-mêmes exclus" , apparaît donc comme une nécessité… D’autant plus que sa « redécouverte » s’ouvre dans une perspective encore plus belle et plus émouvante que sa découverte qui, à l’origine, n’en était qu'au début de son commencement...
En fait, ce n’est pas le « dieu » des Chrétiens, ni celui des Musulmans ou un autre « dieu »… qui nous a chassés du « paradis » : ce sont bel et bien nous, les humains, qui avons en partie, perdu la Connaissance, et qui avons cru retrouver cette Connaissance par la Science, par la Civilisation, par la Technologie, avec des lois édictées par les monarques ou par les parlements, par les codes et par les procédures sans cesse remaniés et adaptés aux évolutions politiques et sociales… Le plus souvent d'ailleurs, au bénéfice d’une minorité « privilégiée » d’humains…
Mais cette Connaissance existait avant que l’humain ne fût, ici ou ailleurs…
…Le Journal de Kafka, 674 pages. Un casse tête aux dires de certains, à la seule idée que l’on peut se faire de ce que suggère à priori, la lecture des écrits et des romans de Kafka…
Mais quelle pureté de langage ! Quelle précision ! Quelle minutie dans les moindres détails ! Et surtout quelle écriture !
... Je retrouve là, dans l'oeuvre de Kafka en général, et en particulier dans cette idée selon laquelle "le paradis n'a pas été détruit" et que " sa redécouverte pour autant qu'il en peut être, s'ouvre dans une perspective encore plus belle et plus émouvante"; et encore, "de ce besoin de surmonter sa révolte"... L'un des thèmes récurrents et privilégiés de ma propre pensée, de toutes les réflexions qui me viennent depuis mon enfance...
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Le grand oiseau
- Par guy sembic
- Le 25/10/2012
- Dans Chroniques et Marmelades diverses
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C’était un grand oiseau derrière un mur très long…
L’oiseau avait la taille d’un homme, la stature et les jambes d’un homme.
Le grand oiseau se tenait donc debout en face du mur. Et le mur était si long que l’on n’en discernait pas les extrémités, ni d’un côté ni de l’autre.
De surcroît, le mur était haut, épais, aussi dur que du métal, compact, sans la moindre fissure et lisse comme une plaque de cuisinière.
Avec ses grandes ailes plaquées sur son dos, ses jambes, sa tête d’aigle, sa fière stature et son regard perçant, le grand oiseau derrière le mur infini recula de quelques pas, comme pour prendre son vol…
Mais l’oiseau ne s’envola point. Ses ailes ne lui servaient à rien…
Le ciel était grillagé, d’un filet aux mailles serrées, métalliques, et secoué par le vent.
Tel un voile gris de nuages bas, ce filet interdisait le ciel...
L’oiseau, à vive allure, fonçait vers le mur, son bec pointé en avant. Un bien étrange bec toutefois, que celui de cet oiseau à fière stature, au regard perçant et aux jambes d’homme…
Ce bec avait la forme, la consistance et la dureté d’une tête de marteau dont la densité et la puissance étaient telles, que ce bec semblait conçu pour faire éclater un bloc rocheux.
L’oiseau frappait le mur avec son bec…
Depuis des jours et des jours, des semaines, des mois, des années, l’oiseau frappait le mur avec son bec. Déterminé, inlassable, l’oiseau frappait, frappait… Encore et encore.
Aucune fissure n’apparaissait sur le mur. Pas même la moindre trace d'aucun de ces coups répétés...
Alors l’oiseau, dont la détermination semblait toujours se renforcer, accrut le rythme de ses frappes. D’autres jours, d’autres mois, d’autres années passèrent…
Un jour, il y eut enfin une trace, une griffure à peine discernable. Puis une deuxième, une troisième griffure…Et des éclats aussi fins que des grains de poussière. Et toutes ces griffures peu à peu, se confondirent en une trace creuse. Une fissure apparut. Et la fissure s’élargit, devint une brèche. L’autre côté du mur parut, les bords déchiquetés de la brèche s’écartèrent, ouvrant ainsi un passage, et l’oiseau traversa le mur.
De l’autre côté du mur, l’on eut dit que c’était le même pays : rien ne semblait différent dans le paysage, de ce côté-là… Mais le ciel n’était plus grillagé.
L’oiseau découvrit que ses ailes lui permettaient de voler, et son bec marteau était devenu un nez.
L’oiseau s’envola et disparut dans le ciel…
Le mur c'est la dureté, la brutalité, la vulgarité, l'indifférence, le silence, le bruit, l'injustice, l'orgueil démesuré et le mouvement trouble du monde...
Un mur intraversable et sans aucune fissure...
Le grillage ce sont toutes les contraintes que le monde nous impose...
La trace ou l'infime griffure qui apparaît à force de coups de bec marteau, c'est la possibilité de la fissure, puis de la brèche et enfin du "passage"...
Mais le "passage" ne s'ouvre pas sur un paysage différent : le paysage demeure le même, mais sans le ciel grillagé au dessus, et l'oiseau s'envole, monte vers la lumière sans être brûlé par la lumière...
Tant que le mur demeure intraversable, et qu'aucune possibilité de fissure n'apparaît, l'oiseau parfois s'élève jusqu'au ciel grillagé et parvient à le traverser... Mais très vite, à peine au dessus des mailles du filet métallique qui ont cédé, l'oiseau est brûlé par la lumière dont il s'est approché de trop près...
Et il doit alors redescendre et continuer de frapper le mur avec son bec marteau...
Il n'y a pas de "passage", par le ciel grillagé...
Le "passage", il ne se fera qu'après la fissure, qu'après la brèche...
De l'autre côté du mur, le paysage ne changera pas, mais il il n'y aura plus ce ciel grillagé...
Alors l'oiseau volera sans être brûlé par la lumière...
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Quand certaines colères enlaidissent un visage, un être tout entier...
- Par guy sembic
- Le 24/10/2012
- Dans Chroniques et Marmelades diverses
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Certaines colères subites, de celles qui éclatent tout à coup lors d'un repas ou d'une réunion familiale ou d'amis ; parce qu'elles révèlent, plus que toutes les autres colères, une "obscurité" en soi, un ressentiment, un "à priori" à l'égard d'une personne en particulier... Peuvent rendre un visage, le visage de la personne en colère, et le regard qui sourd de ce visage, et la personne toute entière même... d'une laideur insoutenable et abjecte...
Plus tard, bien plus tard, lorsque "l'évènement" n'est plus qu'un lointain souvenir, c'est l'image de ce visage là, dans son insoutenable et abjecte laideur, qui demeurera dans la mémoire, et qui éclipsera toutes les autres images de ce visage...
Mais la laideur, la laideur qu'il y a dans une "obscurité en soi", la laideur qui ainsi apparaît, brutale, laminante, puante et criarde... Se fout du souvenir qu'elle va laisser... Puisse-t-elle un jour, en "retour" de bâton au détour de quelque "virage" de la vie... Boomeranguer sur ce visage, rendre à ce visage laideur pour laideur...
Je hais plus la laideur d'un visage dans une colère "révélatrice d'une obscurité en soi", que la laideur du vol lourd et bruyant d'une grosse mouche à viande au dessus d'un détritus...
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Les Autres, d'Alice Ferney
- Par guy sembic
- Le 22/10/2012
- Dans Livres et littérature
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Un livre tout à fait étonnant, et qui nous éclaire sur le sens, sur la complexité, sur la nature même de la relation humaine...
Je savais déjà que l’univers du relationnel était un univers complexe, avec des liens multiples, de « drôles de liens » parfois, des liens étranges, des « dits », des « non dits », des regards, des interrogations, des intonations de voix ; jusqu’à des habillements, des attitudes, des comportements, des silences et de toutes sortes de petits gestes émouvants, évocateurs, messagers… Dans la manière par exemple, de relever une mèche de cheveux ou de se passser un doigt sur le bord des lèvres...
Mais c’est encore ici dans ce livre, entre des personnages que l’on voit apparaître en trois tableaux à la fois différents et semblables, bien plus complexe encore !
Et surtout, révélateur...
L’on ressort de ce livre, LES AUTRES, d’Alice Ferney, « averti » désormais… Mais non pas forcément plus aguerri... Et parfois même, fragilisé...
Pour en savoir plus sur Alice Ferney :
http://www.evene.fr/celebre/biographie/alice-ferney-4154.php
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Virtualodrome, de Denis Juanola, Alexandrie Editions
- Par guy sembic
- Le 19/10/2012
- Dans Livres et littérature
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Je ne lis que peu de romans d'auteurs d'édition en ligne, c'est à dire de ces livres dont on télécharge le contenu pour une lecture sur écran d'ordinateur...
Mais ce livre "Virtualodrome", de Denis Juanola, publié sur Alexandrie Editions, a retenu mon attention...
http://www.alexandrie.org/resum.php?lid=57 : en dessous du résumé, bouton pour le téléchargement du livre... (282 pages)
Déjà pour commencer, ce raid meurtrier dans le métro parisien, de trois énergumènes tout de cuir noir vêtus, bottés casqués, armés de pistolets mitrailleurs, appartenant à un groupe terroriste d’extrême droite, liquidant presque à bout portant des miséreux, SDF et autres marginaux pouilleux sur le quai d’une station… Et comme par hasard, ce toutou cagneux (mais pas méchant du tout) dont on « caressait vicieusement les roustons », réchappant de ce carnage. Faut-il voir là, dans la survie de cet animal famélique, un symbole ? Une signification particulière ? Et dans l’évènement lui-même, un avertissement donné par l’auteur, de ce que pourrait être ce monde de 2022, dans un futur très proche de nous, donc ?
Un peu plus loin, mais assez vite tout de même et cela ne me surprend guère, nous avons droit à une scène de baise virtuelle « des plus classiques » à mon sens : tout y est, le décor paradisiaque (une plage tropicale, du soleil, une fille de rêve…). Cela ne m’a point percuté et encore moins émerveillé outre mesure… Je n’ai pas « bandé comme un étalon » à la lecture de cet épisode de « baise virtuelle » ! Par contre j’ai particulièrement apprécié l’intrusion du pirate dans le serveur de « Hawaïan Dream », même si l’issue est fatale pour la jeune femme Californienne. Et plus loin encore, cette formidable explosion au Ghana, faisant plus de 400 000 victimes à la suite du minage d’un terrain pollué de vieux déchets toxiques et nucléaires.
Avec les tueurs de la VREC, on entre dans un thriller de série noire… Mais un thriller fort bien troussé et dont le déroulement alterne avec des développements et des analyses sur ce monde archi pourri qui est celui des années 20 du 21ème siècle… Les descriptions de lieux et les évocations de faits divers sont truculentes et retiennent l’attention du lecteur par leur côté à la fois tragique, caricatural et comique parfois… Notamment ce passage concernant l’élection de « Miss Troud’balle » dans une boîte hyper branchée, retransmise sur les chaînes de télévision, où l’on voit se pavaner un jury de personnalités censé représenter le « top » de la nouvelle culture émergente…
L’idée de ces crimes réels, perpétrés par un pirate grâce aux prouesses technologiques de ces combinaisons « bio-rétractables », est déjà originale… Mais ce qui est encore plus intéressant, c’est le message que l’auteur a voulu faire passer, en mettant en évidence la finalité de cette série de crimes. Ce Mike Foster donc, l’un des personnages les plus actifs des membres d’une association mondiale pour l’élimination de la pourriture du monde et la promotion d’un « Monde Merveilleux », souhaite que la VREC dont le pouvoir et les bénéfices sont immenses, prenne désormais une place décisive dans le monde entier, pour que le monde change dans le sens de ce que les nombreux militants de l’association « régénératrice » souhaitent… Dans un tel dessein, l’on ne recule pas devant le crime, l’exploitation faite par les médias de ces crimes, et l’on fait admettre dans l’opinion publique, que seule, une « élite » d’humains peut régénérer et reconstruire le monde… Et par conséquent, pour que survive et évolue l’humanité, il faut éliminer dans un premier temps tous les indésirables, petits prédateurs, miséreux, clochards, pourvoyeurs d’une culture du sexe et des plaisirs « malsains » ; et ensuite, par une sorte d’épuration, les « non élus » jugés soit trop mous, soit plus ou moins complices… Un tel message est d’autant plus prémonitoire, d’autant plus d’actualité, et d’autant plus sujet à réflexion dans le monde présent où l’on assiste à une montée en puissance des extrémismes et des fanatismes.
A la lecture de l’épisode relatant l’action de Mike Foster contre les dirigeants de la VREC, puis du récit de l’intervention du célèbre commissaire Lipinsky et de ses lieutenants qui éliminent le gang de Belleville, je pense que l’auteur a intentionnellement surdimensionné les images qu’il nous donne de cette intervention. En effet, toutes ces têtes qui éclatent, ces explosions, ce déluge de feu, ces massacres… Et ces reportages télévisuels avec du matériel hyper sophistiqué, cette retransmission en direct d’un aussi colossal déploiement de forces de police, cette résistance acharnée des membres de ce gang de jeunes du squatt de Belleville ; tout cela n’est pas sans rappeler l’exploitation faite par nos Médias actuels, de faits de guerre et d’actions violentes…
L’on pense également à toutes ces courses à l’audimat, à ces compétitions féroces que se livrent les principaux acteurs de l’économie de l’information, à cette profusion de messages publicitaires dans un monde inculturel et niveleur de sensibilités, essentiellement marchand et constitué de réseaux et d’alliances opportunistes.
Cependant j’ai noté dans cet ouvrage quelques développements qui m’ont paru assez didactiques, parfois un peu « indigestes » par leur contenu, la longueur de certaines phrases… Mais à vrai dire, le lecteur que je suis moi-même en particulier, n’a pas été trop gêné par ces longs développements… que j’ai trouvés intéressants voire passionnants… Disons que je me pose la question de savoir comment un lecteur « lambda », un lecteur préférant plutôt des récits où de tels développements sont absents ou très brefs, va « ingurgiter » toute cette « philosophie »…
Je pense que les « meilleurs livres » ne sont pas toujours les plus aisés à lire. Mais il est vrai aussi que de longues phrases, de longs développements, de longues descriptions ; dans la mesure où le rythme, le ton, l’image, le souffle, la respiration, et l’émotion sont au rendez vous... Ce n'est pas un défaut...
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De la nécessité du débat et de la réaction...
- Par guy sembic
- Le 18/10/2012
- Dans Pensée, réflexions, notes, tags
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"Un progrès décisif serait réalisé, si l'on se décidait à exposer honnêtement les contradictions essentielles à la pensée, au lieu de chercher vainement à les écarter". ( Simone Weil )
Lorsque le penseur se trouve en un lieu où ses réflexions sont entendues sans être débattues, il a renoncé à la philosophie... Dès lors même qu'il avance ses réflexions comme des pièces sur un échiquier en se faisant à l'idée que les pièces ont été placées là où il faut...
... L'on mesure bien dans le fait d'écarter la contradiction, d'une part ; et dans le fait que la réflexion soit entendue sans être débattue, d'autre part... L'inertie de la discussion, l'inertie du propos, l'inertie dans la relation...
Et le pire, c'est lorsque le penseur s'exprime alors même qu'il conçoit, par une sorte de certitude ancrée en lui, que nul débat ne s'ensuivra... À vrai dire il est tellement sûr de ce qu'il exprime, qu'il ne voit ni ne conçoit comment un débat pourrait s'ensuivre... Et c'est ainsi qu'il renonce à la philosophie, qu'il devient dogmatique, qu'il s'enferme et s'isole dans cet espace clos qui est sa certitude...
Mais le penseur qui porte au bout de son regard un point d'interrogation (et il y en a, de ces penseurs là)... Attend et espère, lui, un débat... Un débat qui hélas le plus souvent ne vient pas, et aucune réaction, aucun commentaire ne vient donc, à propos de ce qu'il exprime... Alors ce penseur là ne renonce pas, lui, à la philosophie... Mais de même que le penseur qui renonce à la philosophie en croyant le débat inutile, il s' enferme et s'isole dans un espace... un espace qui n'est plus clos mais ouvert et empli de silence...
Et qu'est-ce qui est "préférable" : l'espace clos d'une certitude en soi, ou l'espace ouvert empli de silence ? ...
... À moins qu'il ne parvienne à communiquer, et encore mieux à transmettre, autrement que par sa pensée, c'est à dire par la manière dont il agit, dont il se comporte, dont il se gère et gère la situation ou l'évènement survenant à tel moment dans sa vie...
La relation "purement virtuelle" avec les Autres (je pense à la relation dans l'univers du Net et donc à travers les forums, les réseaux sociaux et les blogs)... Ne fait pas davantage naître le débat, que la relation "dans le réel" avec les Autres : la relation virtuelle ferait même disparaître le débat, en partie ou totalement, dans une sorte de brouillard hachuré de signes verticaux, horizontaux, ou de taches entremêlées de différentes couleurs...
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Le festival international de géographie...
- Par guy sembic
- Le 15/10/2012
- Dans Chroniques et Marmelades diverses
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... A Saint Dié, dans les Vosges...
L'un de ces rendez-vous "immanquables" à mon sens, entre autres grandes manifestations culturelles, et qui en est cette année à sa 23 ème édition (le premier a eu lieu en 1990)... Du 11 au 14 octobre en 2012...
Le thème choisi pour cette année 2012 : Les facettes du paysage, nature, culture, économie... Pays invité : la Turquie.
Entre le festival de l'an dernier, dont le thème était l'Afrique et le pays invité le Rwanda ; et le festival de cette année, "les facettes du paysage" et pays invité la Turquie... Dix mois de travaux de restauration et d'aménagement furent nécessaires pour donner à l'espace Georges Sadoul "centre opérationnel" ou "grand quartier général" du festival, un "nouveau look de style, d'architecture et de conception "très 21 ème siècle"...
... Mais... je risque ici une "petite remarque" concernant ces gigantesques -et fort coûteux- travaux de restauration et d'aménagement "aux normes Européennes et internationales" en matière de sécurité/accessibilité... au sujet... des toilettes !
Les toilettes en ce lieu public si renommé (la salle de conférence peut accueillir 750 personnes) sont "ultramodernes"... mais "minables" en ce sens que l'on n'y trouve que 4 urinoirs dont 1 plus petit pour les enfants et 1 seule toilette fermée (à la fois pour handicapés et " gens normaux")... De surcroît, il n'y a pas de "petite cloisonnette" de séparation entre les urinoirs... (bonjour la discrétion !)
Je vous laisse imaginer à la sortie de la conférence, sur 700 personnes, au moins une dizaine voire une vingtaine se rendant aux toilettes en même temps !
Les toilettes de l'espace Georges Sadoul à Saint Dié dans les Vosges, n'ont donc "aucune sécurité urinaire" !
... Voici une galerie de photos, de ce 23 ème Festival International de Géographie :
http://www.fig.saint-die-des-vosges.fr/toute-lactu/fig-2012-jeudi-11-octobre-2012#menu
L'on voit sur quelques unes de ces photos, la salle de conférence Yvan Goll dans son ensemble : refaite à neuf et aux normes...alors que l'ancienne salle était loin d'être démodée et délabrée (elle était même plus confortable avec de meilleurs sièges et une meilleure acoustique)... Et il n'y a pas à vrai dire beaucoup plus de places assises qu'avant (parterre et balcon) compte tenu de la largeur des escaliers et de l'espace pris par les deux sorties...
Le maire de Saint Dié, Christian Pierret, coupe le fil pour l'inauguration de la salle, et sur sa droite, une très belle femme, très chic en noir et avec une écharpe rouge...
La cérémonie d'ouverture avec présentation des invités, le jeudi 11 octobre à 18h...
Et l' interwiev de Mireille Delmas-Marty, présidente de la 23 ème édition du FIG.
Il est clair que, cette année, le nombre de visiteurs (festivaliers) paraît plus important que l'an passé ou même que les années précédentes, à en juger par la densité des foules entrant et sortant de l'espace Georges Sadoul (QG du FIG), du salon du livre et des autres lieux de conférences et manifestations et expositions...
Cependant, les discussions en "table ronde" lors des conférences m'ont paru cette année plus "formalistes" et donc, un peu moins intéressantes du moins pour celles auxquelles j'ai assisté... Néanmoins furent abordés quelques sujets "sensibles" notamment sur la gestion de l'environnement péri-urbain, et la transformation des paysages dans un but marchand ou économique...
D'ailleurs, autant la salle était pleine, et autant par moments, les gens sortaient ou entraient, ce qui s'avérait gênant pour suivre la discussion à cause du bruit de fond de ces allées et venues...
... J'imagine (le pays invité étant la Turquie et vu l'importance de la communauté Turque dans les Vosges et dans l'Est de la France)... J'imagine que la gastronomie Vosgienne, fondée sur le porc, n'a pas dû "être à l'honneur" et qu'il a fallu que les restaurateurs de Saint Dié "s'adaptent quelque peu" en ayant prévu à l'avance pour les 4 jours du festival, force quartiers d'agneau ou de mouton dans leurs congélateurs... La Turquie est en effet pour 99% de sa population, Musulmane (mais la plupart le sont de tradition bien plus que de culte réel, tout comme nous en France on est beaucoup catholique de tradition)...
Cependant, au salon de la Gastronomie, espace François Mitterrand, comme les autres années, se tenaient nos charcutiers et nos étalages de pièces fumées, saucissons et jambons... Et il va sans dire qu'autour de ces rayons là, on ne voyait guère de femmes en foulard sur la tête et longues jupes jusqu'aux talons...
... J'ai été "un peu surpris" du choix, par les autorités du festival, de Régine Desforges "grand témoin" du festival cette année...
Certes, je ne minimise pas la dimension littéraire – romanesque plus précisément- de Régine Desforges, mais je pense qu'elle a été choisie du fait du succès remporté auprès d'un très large public, par son livre "la bicyclette bleue", tiré à dix millions d'exemplaires...
Lors des festivals précédants, les Grands Témoins étaient en 2009 Philippe Meyer, journaliste, écrivain, chroniqueur, homme de radio... En 2010 Noëlle Châtelet, femme de lettres et universitaire, comédienne... En 2011 Sophie Bessis, journaliste, historienne et économiste... Il y avait donc lors des festivals précédants, pour témoigner de ce qui fut durant les quatre journées, tant dans les salles de conférences que d'un lieu à l'autre des différentes manifestations... La "dimension journalistique" si je puis dire, en plus de la dimension d'écrivain...
... Le dimanche 14 octobre, "Vosges matin" titrait "Vers un FIG revisité en 2013"... Ce qui veut dire que désormais à partir de l'an prochain et pour autant que cette manifestation annuelle puisse être maintenue aussi longtemps encore que possible... Les sponsors, les acteurs économiques, en gros la mondialisation et la marchandisation et les médias interposés, seront plus présents, plus influents... Et qu'en conséquence, le Festival International de Géographie "changera donc de visage"... (de visage et "d'atmosphère")...
Déjà cette année 2012 l'on percevait nettement ce changement, dans la mesure où l'on sentait que "tout avait été fait" par les grands médias régionaux, pour attirer le plus de monde possible, ne serait-ce que par la configuration des lieux, l'apparence, le "look", les boutiques, la vente de toutes sortes d'objets et de gadgets... Ainsi le "visuel" prenait largement le pas sur la "thématique" (les conférences, sujets développés, etc. )
Néanmoins ce qui, à mon sens "ne changera jamais", c'est bien le caractère scientifique, et l'esprit, et la dimension de connaissance, de réflexion, d'humanisme, de tous ces géographes venus du monde entier, qui eux forment bien une communauté de gens "hors du commun" et ne se laissent pas emporter par le courant de la mondialisation marchande et formatée... D'ailleurs, ces gens là, il suffit de les approcher tant soit peu, de les écouter, pour s'apercevoir qu'en dépit du côté technique, du côté "formation universitaire" de leur discours, il y a bien en eux cette dimension d'humanisme, cette dimension dans la relation, dans l'esprit, dans la connaissance, dans la recherche, dans une "vision du monde"... Que l'on ne retrouve absolument pas (et pour cause) chez les politiques, les acteurs économiques et financiers, les sponsors et les journalistes en conformité avec "ce qui doit être représenté dans le sens du monde"...
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L'écran invisible dans l'ouverture de la porte
- Par guy sembic
- Le 15/10/2012
- Dans Pensée, réflexions, notes, tags
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Une pensée qui ne peut être controversée est une pensée suspecte...
Ainsi, lorsque cette pensée s'articule sur une argumentation qui ne peut qu'être difficilement contestée, infirmée, critiquée tant elle paraît "juste"... et de surcroît "morale"...
Cette pensée devient alors comme un "modèle" et semble "s'imposer d'elle-même"... Elle se présente à celui ou à celle qui la reçoit, comme un passage, une voie, un chemin qui s'ouvre sur un "ailleurs" qui attire... Mais dans l'ouverture il y a comme une sorte d'écran invisible, un écran qui en réalité, ferme, occulte et limite...
Toute pensée si "juste", si "morale" puisse-t-elle nous paraître ; doit pouvoir souffrir la contradiction, doit pouvoir être discutée, infirmée si nécessaire... Et devrait être exprimée avec "un point d'interrogation au bout du regard qui la porte"...
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Eloge de la transmission...
- Par guy sembic
- Le 12/10/2012
- Dans Chroniques et Marmelades diverses
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... "Et si on leur apprenait à lire"... Par Natacha Polony, le 16 septembre 2012...
http://blog.lefigaro.fr/education/
"L'élève ne lit que ce qu'il a appris à écrire"... Ainsi parle Muriel Strupiechonski dans son livre "Mon cp avec Papyrus", éditions du GRIP ( groupe de réflexion interdisciplinaire sur les programmes )...
Un manuel d'apprentissage de la langue écrite et orale, qui se fonde sur la reconnaissance de la lettre, puis de la syllabe, puis du mot, et du mot dans la phrase, pour finir par une histoire complète...
Le manuel de Muriel Strupiechonski part de l'apprentissage des voyelles : l'on n'articule les consonnes qu'avec des voyelles.
... Effrayant :
17 % (chiffre officiel ne réflétant sans doute pas la tragique réalité) des élèves ne savent ni lire ni écrire à l'entrée en 6ème... Mais, doit dit en passant, tous savent très bien utiliser des i-phones et des smartphones, et rédiger des messages dans le genre "yakacékoul" sur Facebook...
170 000 élèves de 3ème sortent du système scolaire, chaque année, pour entrer dans la vie professionnelle mais en fait dans une grande précarité, et sans perspective d'avenir, de métier, de carrière...
La plupart des jeunes, et cela se remarque même chez des gens de trente ou quarante ans... "miaulent" plus qu'ils ne parlent : ils "bouffent la moitié des mots", et à toute vitesse, de telle sorte que l'on entend ce qu'ils disent mais sans réellement comprendre... D'ailleurs à ce sujet, il faut voir dans les films de télévision, dans les séries américaines ou autres, la manière dont les dialogues sont stéréotypés, formatés, tous construits sur le même modèle, avec les mêmes intonations de voix... et tous, pratiquement inaudibles (c'est à dire incompréhensibles)...
... C'est donc cela, le système éducatif, que François Hollande veut changer...
Autant s'attaquer si je puis dire, si j'ose dire... À quarante ans de "terrorisme intellectuel" de Gauche comme de Droite... Une sorte de "terrorisme", oui, qui nous a imposé tant de modes, tant d'expérimentations, tant de "pensée unique -et inique-"...
... Natacha Polony est à mons sens "une journaliste pas tout à fait comme les autres" (c'est à dire "un peu moins dans le sens du monde et de la pensée unique")... Certains la qualifient "d'anarchiste de droite"...
Elle a été au Figaro, mais elle n'y est plus en tant que salariée... Elle anime à présent une chronique sur Europe 1 le matin à 8h 30...
C'est une journaliste littéraire "qui ne fait pas dans la dentelle" (sans jamais la moindre vulgarité, et avec une connaissance -objective et travaillée, réfléchie- de tous les thèmes, sujets ou questions qu'elle traite avec ses interlocuteurs...
J'aime bien cette expression "anarchiste de droite" ! ... Mais à vrai dire, "se sentir anarchiste", ça n'a rien à voir avec une sensibilité de Droite ou de Gauche...
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Textes à écouter...
- Par guy sembic
- Le 10/10/2012
- Dans Anecdotes et divers
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Dans la rubrique Yugcib-Textes-Voix du sommaire, menu déroulant à gauche, je viens de rajouter deux textes : Le caillou, et Rodolphe le SDF.
Lorsque ces fichiers audio sont inférieurs à 10 Mo, l'on peut voir juste en dessous du titre du texte, dans la page "textes voix", le "player" sur lequel il faut cliquer, et le texte est alors immédiatement écoutable...
Cependant, lorsque les fichiers audio que j'ajoute sont supérieurs à 10 Mo (il y en a quelques uns) je place alors en dessous du titre du texte, le lien d'accès (un lien venant de mon espace de stockage sur Windows Live) : dans ce cas, le texte se télécharge en 1 ou 2 minutes... (c'est moins pratique mais je ne vois pas comment faire autrement, pour les fichiers qui ont du poids en Mo)...
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Territoires d'exil
- Par guy sembic
- Le 09/10/2012
- Dans Chroniques et Marmelades diverses
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Ce qui fait défaut aujourd'hui dans la vie quotidienne, dans tout ce que l'on exprime sur le Net par les blogs, les réseaux sociaux et les forums, c'est une dimension d'une certaine envergure dans la relation et dans la réflexion... Sans pour autant rassembler les gens comme le ferait par exemple un courant de pensée ou fédérer des sensibilités différentes autour de quelques "valeurs universelles"...
Cette "dimension d'une certaine envergure" pourrait s'apparenter à un torrent impétueux d'une eau claire, vive et chantante devenant rivière puis fleuve et delta...
Quel regard porte-t-on sur le monde, sur les gens, sur les "choses de la vie" que sont les situations, les évènements, les drames, les secousses sociales, les jours heureux ou malheureux des uns et des autres ?
Est-ce un regard désabusé, un regard critique, un regard formaté... Ou un regard libre ?
Un regard dans lequel viendrait une intuition de ce qui sera, et un souvenir de ce qui fut... Un regard qui s'ouvre et entrevoit un ciel qui existe mais où l'on ne s'est pas envolé...
Ces "territoires d'exil" que sont nos mondes et nos recoins de monde soit-disant "éclairés", ont désenchanté la relation, dénaturé et même perverti la réflexion...
Mais ces territoires là ne sont d'exil que pour ceux et celles qui, contraints d'y habiter, y souffrent et cherchent à les quitter... Pour les "autres", ces territoires sont comme d'immenses supermarchés...
Il n'y a que le torrent impétueux d'une eau claire, vive et chantante devenant rivière puis fleuve et delta... qui peut disloquer et emporter dans son courant ces "territoires d'exil"...
... Mais... Si tu es dans un territoire d'exil... N'est-ce point parce que dans cette vie où tu fus jeté, tu n'y as vu qu'un territoire d' exil ?
Alors, il te faudra bien, dans ce territoire d'exil, dans cette vie où tu fus jeté, y apprendre à vivre des jours heureux... Comme par exemple, ces "enfants du huitième jour", de sortie avec leur éducateur, poussant ensemble un chariot dans les allées d'un supermarché et riant, s'étonnant d'un rien, d'une image sur une boîte de conserve, du reflet d'un visage dans une glace... Ou encore, comme ce passager d'un avion de ligne assis à côté du hublot, qui regarde les nuages au dessus de l'océan au lieu du film sur petit écran en face de son siège...
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Marcel Proust : Contre Sainte Beuve, Folio Essais...
- Par guy sembic
- Le 08/10/2012
- Dans Livres et littérature
- 0 commentaire
Ayant découvert Marcel Proust, seulement dans les premières années du 21 ème siècle, en lisant "Contre Sainte Beuve", je cite ces lignes, page 70 dans le chapitre « journées » :
« J’aperçois un de ces êtres qui nous dit par son visage particulier la possibilité d’un bonheur nouveau. La beauté, en étant particulière, multiplie les possibilités de bonheur. Chaque être est comme un idéal encore inconnu qui s’ouvre à nous. Et de voir passer un visage désirable que nous ne connaissions pas nous ouvre de nouvelles vies que nous désirons vivre. Ils disparaissent au coin de la rue, mais nous espérons les revoir, nous restons avec l’idée qu’il y a bien plus de vies que nous ne pensions à vivre, et cela donne plus de valeur à notre personne. Un nouveau visage qui a passé, c’est comme le charme d’un nouveau pays qui s’est révélé à nous par un livre. »
... Sublime, n'est-ce pas ?
Et j'ai poursuivi dans ma découverte de cet auteur, par "À la recherche du temps perdu"...
Une lecture "au long cours"... Comme sur un paquebot transatlantique du temps de Georges Simenon entre Le Havre et le canal de Panama...
Pas d'intrigues compliquées mais un "kaléidoscope" de petites scènes de vie quotidienne avec chacune son atmosphère... Et comme sur l'océan, à l'infini, de petites crêtes blanches qui se meuvent et se balancent en une cadence toute tranquille ; et tous ces sentiments, tous ces changements de point de vue exprimés...
Certes, tout cela se passe "dans le beau monde" mais les sentiments, les émotions, les pensées de "ces gens là", après tout... Sont-ils si différents que cela des sentiments, des émotions et des pensées, des gens que l'on dit être "du pauvre monde" ?
N'y-a-t-il pas en chacun de nous, autant de vanité, autant de fureur ou même de gesticulation, à essayer de "s'exister" à tout prix ? Autant de souffrance aussi, autant de solitude au fond de soi ? Autant de "non dit" et autant de ces rêves qui partent dans le "grand inconnu" ou "dans les étoiles" quand on est mort ?
Vers la fin de son existence, Marcel Proust fut contraint à l'immobilité, du fait de sa santé déficiente...
Est-il "si nécessaire que cela", à un grand écrivain, de bouger beaucoup, de sans cesse parcourir le monde... et tous les mondes possibles ?
La culture, l'observation, l'intuition, l'imagination, la réflexion... Ce sont bien là comme des "bouées" non pas de "naufragé qui veut se sauver à tout prix et rejoindre quelque rivage", mais "d'enfant trop vite grandi au milieu des baïnes qui veut partir à l'assaut des vagues pour y danser, y voler dessus"...
Dans " À la recherche du temps perdu", le narrateur est souvent ravi par "le visage de l'inconnue"...
Ainsi, Albertine en vélo au bord de la mer ; la laitière aperçue sur un quai de gare au moment de l'arrêt du train au lever du jour... Deviendront l'image récurrente.
D'où vient cette idée -absurde- qu'il y aurait du "snobisme" à lire Proust ?
Ou qu'il y aurait "un trop grand décalage" dans la forme, dans le style d'écriture, entre cet auteur du début du siècle dernier et nos auteurs du début du siècle présent ? ( un décalage dans la forme et dans le style qui d'ailleurs est largement entretenu par les modes, par les médias, par de "soit-disantes nouvelles valeurs" )...
"L'on n'écrit plus comme cela"... C'est vrai... (mais est-ce que c'est "tragiquement vrai"?... ce n'est pas si sûr ni si désespérant à vrai dire et si l'on réfléchit tant soit peu...)
Ces longues phrases forment comme des tableaux impressionnistes aux très belles images...
Et je les trouve "très actuelles"... Ou, plus précisément encore... " intemporelles"...
... Ce qui est "nouveau"... ou nous semble nouveau, ne tire-t-il pas sa "nouveauté" en réalité, de ce qui demeure à jamais, intemporel ? Ou, comme l'on le croit, comme l'on se l'illusionne, de ce qui surgit et s'impose dans le temps immédiat, le temps présent, ce temps aussi fugace que l'éclair d'un orage ou que l'onde sur l'eau ?
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Le caillou
- Par guy sembic
- Le 06/10/2012
- Dans Anecdotes et divers
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Le caillou est dur, gris et froid ; et s'il brille par endroits quand on le retourne dans tous les sens, il ne brille que des paillettes que l'on y a jetées dessus...
L'on croit que les paillettes sont incrustées dans la surface rugueuse et irrégulière du caillou, mais si l'on gratte tant soit peu de l'ongle, alors les paillettes se désagrègent en une poussière argentée que l'air ambiant emporte...
Mais il y a -peut-être- dans la surface dure, grise, froide, rugueuse et irrégulière du caillou, de toutes petites veines bleues d'une matière étonnante et rare...
De toutes petites veines bleues qui jamais ne brillent et que l'oeil ne voit pas...
Alors dans ces longs déserts que nous traversons, dans ces longs déserts de cailloux durs, gris et froids ; et quand les paillettes se sont désagrégées en poussière argentée emportée dans l'air...
L'oeil dont le regard s'ennuie, cherche alors sur le caillou dur, gris et froid, les petites veines bleues... Qu'il ne trouve pas toujours cependant... Ou qu'il imagine en petits chemins blancs et lumineux courant sur le caillou dur, gris et froid...
Et le regard cesse de s'ennuyer quand il parvient à entrevoir les petites veines bleues...
Ou quand il imagine les petits chemins blancs...
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La tuerie d'Echirolles
- Par guy sembic
- Le 03/10/2012
- Dans Chroniques et Marmelades diverses
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... Cet horrible et dramatique fait divers, ce massacre à vrai dire, pour reprendre les mots même de Manuel Valls ministre de l'Intérieur... Ce massacre perpétré par une horde de jeunes sauvages, et cela au départ pour un motif très futile (un mauvais regard, à l'origine)... Me fait penser à une scène dont j'ai été témoin quand j'étais âgé d'une vingtaine d'années, à Paris, un jour de mai 1970 ou 1971...
Je m'apprêtais à prendre le train gare d'Austerlitz pour Dax et j'avais une bonne demi heure d'avance avant le départ du rapide Paris Austerlitz Irun Tarbes de 8h 45...
La cour des départs gare d'Austerlitz donnait sur le boulevard de la Gare le long des quais de la Seine, et le pont d'Austerlitz n'était pas loin... À cette heure là, il y avait beaucoup de monde dans le secteur, de la circulation, de l'animation, et chose curieuse ce jour là, pas un agent de police, aucun car de CRS à l'horizon, alors qu'en ce lieu l'on voyait souvent d'ordinaire le long du boulevard, trois ou quatre cars de CRS, et quelques gardiens de la paix, de ci de là...
Je marchais, d'un pas tranquille, entre le côté des départs et le côté des arrivées, sur le trottoir du boulevard qui va droit vers le pont d'Austerlitz, cherchant un café servant des croissants au comptoir, et sur cette portion du trottoir à ce moment là, peu de gens passaient...
Je vis une vieille dame, courbée, qui visiblement avait du mal à marcher, tenant un sac à main et tout à coup surgit un type "à face de rat" qui n'était pas cependant vêtu comme un clochard, il était même en costard noir fripé la cravate de travers avec une chemise blanche sale au col...
Et le type arrache le sac à main de la dame et se met à courir à toutes jambes, je le vois encore courir comme un dératé, son regard fou, perdu, halluciné, le sac à main volant au bout de son bras comme une étoffe dans le vent...
Un autre type qui avait vu la scène se précipite derrière le voleur, le rattrape et le ceinture... Le sac à main tombe, une autre personne intervient et jette le sac à main devant la vieille dame qui le ramasse aussitôt...
Mais en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, une vingtaine d'autres gens se précipitent dans une mêlée indescriptible, telle une masse de crabes sur une plage se jetant sur un oiseau blessé incapable de s'envoler, autour du type "à face de rat", tous ces gens là ayant été aussi témoins de la scène depuis l'autre côté du boulevard...
Et le type fut frappé à coups de poings, jeté au sol, piétiné, puis ensuite traîné par terre... et -j'en viens au pire- conduit comme un sac de patates tiré, entouré de la masse de ces gens, vers le pont d'Austerlitz... Mais la masse des gens était si confuse et si compacte que je n'ai pas vu le type tomber à l'eau, depuis l'endroit où je me trouvais...
Dans le train qui lentement s'ébranlait (j'étais encore seul dans le compartiment) je pensais à cette scène et chose curieuse, d'un côté je trouvais que le type (le voleur) méritait bien ce qui lui était arrivé ; mais d'un autre côté j'étais bouleversé, suffoqué par ce déchaînement de violence et de barbarie dont je venais d'être témoin... et je partis dans une longue réflexion empreinte de gravité, d'interrogation... La vérité c'était que j'étais demeuré dans cette affaire là, seulement et uniquement témoin, témoin passif et observateur, et sans le moindre réflexe me poussant à intervenir dans un sens ou dans un autre...
Ces gens, qui étaient autour du type, lui donnaient des coups de poing et de pied, puis l'ont tiré et sans doute jeté dans la Seine depuis le pont d'Austerlitz, eh bien ces gens là, oui, c'étaient "des gens comme vous et moi", de tous âges, des gens "normaux", qui, cinq minutes avant, marchaient d'un pas alerte ou tranquille le long du trottoir, se rendant à leur travail, pensant peut-être à leur femme, leur mari, leur enfant laissé à la maison, ou à quelque projet de vacances d'été... Rien ne laissait prévoir qu'en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, ils allaient devenir comme une masse de crabes se jetant sur un oiseau incapable de s'envoler...
C'était, je le redis... Il y a 40 ou 42 ans de celà... 1970 ou 1971...
Certes, le contexte du drame d'Echirolles en septembre 2012, n'est pas le même : ici le motif est futile, et les assassins ne sont pas tout à fait "des gens comme les autres" (question d'absence totale de repères, de milieu familial, social, d'éducation, de morale et de tout ce qu'on veut ; d'absence totale de toute notion de "valeurs" dans la relation, le tout lié à la misère, au trafic de drogue, au chômage endémique ; à l'absence de toute perspective d'avenir, dans une violence permanente ambiante, et avec tout ce qu'on voit à la télé et dans les jeux vidéos)... Alors qu'en mai 1969 ou 1970, le contexte était différent : un type arrachant le sac à main d'une vieille dame et pris à partie aussitôt par des témoins de la scène, donc un motif beaucoup moins futile ; et, un environnement socio-économique bien différent de celui d'aujourd'hui : pas de chômage, des "valeurs", de la morale à l'école, du traditionalisme, la messe le dimanche, le catéchisme, première communion, moins de divorces, moins de drames sociaux (disons que la violence aussi, n'était pas aussi médiatisée)...
Tout cela pour dire en définitive, que lorsque les passions se déchaînent sans que rien ne les retiennent ( pas le moindre flic à l'horizon par exemple) alors quelle que soit l'époque, quelles que soient les "valeurs", la culture, la morale, les modes de vie de l'époque... Et (sans doute la question la plus importante) quoi que l'on puisse porter en soi de soit-disant ou de réellement meilleur... lorsque les passions se déchaînent donc, c'est davantage pour le pire que pour le meilleur...
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Will Hunting
- Par guy sembic
- Le 02/10/2012
- Dans Chroniques et Marmelades diverses
- 0 commentaire
... Lundi 1er octobre sur W9 (chaîne TNT canal 9) à 20h 50 : "Will Hunting", un "film culte" à mon sens... que j'avais déjà vu au cinéma il y a quelques années et qui, "m'a autant marqué" que "l'insoutenable légèreté de l'être" d'après le livre de Milan Kundera, et que "Sur la route de Madison" de Klint Eastwood...
D'ordinaire sur W9, tout comme sur les autres chaînes de la TNT ce sont le plus souvent des émissions de variétés "passe-partout", ou des séries ou des films TV...
Là, avec ce film, "Will Hunting", nous sommes dans du très grand cinéma, avec de la réflexion, du "solide", de l'émotion, une histoire vraiment très belle et peu ordinaire, et de très bons interprètes : Matt Damon, Ben Affleck, qui ont écrit le scénario ; Robin Williams, Minnie Driver...
Certes le scénario (l'histoire) au premier abord, reprend un thème souvent abordé (un jeune marginal génial remarqué par un grand professeur) mais il y a dans cette histoire, une "atmosphère" à nulle autre pareille, et quelque chose qui suscite de la pensée, de la réflexion et en même temps de l'émotion... et qui est "assez poétique" par moments... Et quelques dialogues à mon sens "légendaires"... du genre de ceux qui font hélas défaut dans l'environnement relationel qui est le nôtre au quotidien...
Nous étions déjà "dans cette même veine" avec "l'insoutenable légèreté de l'être", et avec "Sur la route de Madison"...
... Will Hunting : "le film des films", dis-je ! (et certains morceaux de musique dans le film)...
Les réalisateurs de films et les artistes, acteurs américains, produisent parfois de véritables chefs d'oeuvre... Cela tient-il de leur immensité géographique, de la violence de leur nature, de la diversité de leurs populations, de leur gigantisme, de leurs grandes plaines infinies où l'on meurt d'ennui dans des bourgades ou des petites villes sans magie ? ... L'on y trouve sans doute plus qu'ailleurs encore dans le monde, le pire et le meilleur de l'Homme... (l'Amérique c'est un pays "terrible" mais qui m'a toujours fait rêver)...